Nouvelles perspectives sur le vieillissement
Cerveau vieillissant: plasticité accrue, mais déréglée
Selon un vieil adage, on n’apprend pas à un vieux singe à faire la grimace, mais une nouvelle étude révèle qu’on peut apprendre à un vieux rat à réagir à de nouveaux sons, même s’il ne retient pas la leçon très longtemps.
Des chercheurs de l’Institut et hĂ´pital neurologiques de MontrĂ©al (LeNeuro) de l’UniversitĂ© Ć˝ĚŘÎ岻ÖĐ ont Ă©tudiĂ© les effets du vieillissement sur la neuroplasticitĂ© du cortex auditif primaire, rĂ©gion du cerveau oĂą sont traitĂ©es les informations auditives. On entend par «neuroplasticité» la capacitĂ© du cerveau Ă remodeler les connexions entre ses neurones et Ă s’adapter aux contraintes environnementales, processus au cĹ“ur mĂŞme de l’apprentissage.
Le cerveau jeune présente une très grande plasticité, nos sens étant constamment sollicités lorsque nous apprenons à nous situer au sein de notre environnement. Au fur et à mesure que nous prenons de l’âge, notre cerveau devient moins malléable afin de consolider nos acquis. Cette stabilisation de la plasticité est en partie régie par un neurotransmetteur appelé «acide gamma-aminobutyrique» (GABA), qui inhibe l’activité neuronale. par K.A.C.Elliot et ErnstFlorey, au Neuro, en1956.
Le Dr Mike Cisneros-Franco, auteur principal de l’étude, et le DrÉtienne de Villers-Sidani, directeur de laboratoire, souhaitaient vérifier l’hypothèse selon laquelle ce processus de stabilisation de la plasticité se dérègle au cours du vieillissement. Ils ont donc réalisé une expérience consistant à exposer des rats à des signaux sonores d’une certaine fréquence afin de déterminer comment les neurones du cortex auditif primaire réagissent à ces derniers. Ils ont découvert que les neurones des rats adultes plus âgés exposés à ces signaux sonores étaient de plus en plus sensibles à la fréquence, phénomène qui n’a pas été observé chez les rats adultes plus jeunes. L’effet observé chez les rats adultes plus âgés a disparu rapidement après l’exposition aux signaux sonores, ce qui témoigne du dérèglement de la plasticité. Toutefois, l’augmentation des taux du neurotransmetteur GABA chez des rats plus âgés d’un autre groupe a été associée à un allongement de la durée des perturbations de la plasticité du cortex auditif causées par l’exposition aux signaux sonores.
Ces résultats donnent à penser que la capacité du cerveau à adapter ses propriétés fonctionnelles ne disparaît pas avec l’âge. Ils nous apportent plutôt la preuve que la plasticité est accrue, mais déréglée, dans le cerveau vieillissant, en raison d’une diminution des taux de GABA. En fait, ces résultats permettent de croire que l’augmentation des taux de GABA pourrait améliorer le maintien des acquis dans le cerveau vieillissant.
«Nos travaux ont permis de démontrer que le cerveau vieillissant est, contrairement à une notion largement répandue, plus malléable que celui d’un jeune adulte», affirme le DrCisneros-Franco. «En revanche, cette plus grande plasticité signifie que les changements obtenus par la stimulation ou l’apprentissage étaient instables: à la fois faciles à obtenir et faciles à faire disparaître.»
«Toutefois, nous avons également démontré qu’il est possible de réduire cette instabilité au moyen de médicaments utilisés en clinique. Les chercheurs et les cliniciens pourront tirer parti de ces résultats pour concevoir des stratégies de réadaptation permettant d’exploiter toutes les possibilités offertes par la plasticité du cerveau vieillissant.»
, publiée le 21 août dans la revue eNeuro, a été rendue possible grâce au financement des Instituts de recherche en santé du Canada et du Conseil national des sciences et de la technologie des États-Unis du Mexique (CONACYT).
Ă€ propos du Neuro
L’institut et hĂ´pital neurologiques de MontrĂ©al, dit le Neuro, est un chef de file mondial dans le domaine de la recherche sur le cerveau et des soins de pointe. Depuis sa crĂ©ation en 1934 par le cĂ©lèbre neurochirurgien DrWilder Penfield, le Neuro connaĂ®t une croissance inĂ©galĂ©e qui en fait le plus grand Ă©tablissement de recherche et de soins cliniques spĂ©cialisĂ© en neuroscience au Canada, et l’un des plus importants sur la scène internationale. L’intĂ©gration fĂ©conde de la recherche, des soins aux patients et de la formation par les plus Ă©minents spĂ©cialistes Ă l’échelle mondiale placent le Neuro dans une position unique en matière de connaissance et de traitement des affections du système nerveux. En 2016, le Neuro est devenu le premier institut au monde Ă adhĂ©rer complètement Ă la philosophie de la science ouverte, ce qui a donnĂ© naissance Ă l’Institut de science ouverte Tanenbaum. L’HĂ´pital neurologique de MontrĂ©al fait partie de la mission en neurosciences du Centre universitaire de santĂ© Ć˝ĚŘÎ岻ÖĐ.