L’avenir des neurosciences réside dans la collaboration, non seulement entre les établissements, mais aussi entre les pays. Une entente trinationale permettra d’accélérer la découverte de traitements efficaces contre la démence et la maladie d’Alzheimer, deux des problèmes de santé les plus pressants de notre époque.
En janvierÌý2018, les gouvernements de la Chine, de Cuba et du Québec ont annoncé un soutien financier qui permettra aux neuroscientifiques de ces trois partenaires de recueillir et de mettre en commun des données sur la cartographie du cerveau dans le cadre de leurs travaux de recherche sur la démence.
Ces travaux visent à élucider les mécanismes fondamentaux de la démence, à trouver des biomarqueurs pour le dépistage de la maladie d’Alzheimer à un stade précoce, à s’assurer que les découvertes réalisées en laboratoire se traduisent plus rapidement par des applications cliniques, et à évaluer l’incidence de divers aspects du mode de vie sur la démence. En raison du vieillissement de la population mondiale, la démence est maintenant l’un des plus importants problèmes de santé de notre époque, et les coûts liés aux soins médicaux et à la perte de productivité attribuable à cette maladie représentent des milliards de dollars.
La structure de l’Axe trinational sur le vieillissement cognitif normal et pathologique permettra aux scientifiques canadiens, cubains et chinois d’obtenir des résultats qu’ils ne pourraient obtenir en travaillant en vase clos dans leur pays d’origine.
Au Canada, le chercheur principal du projet est le PrÌýAlanÌýEvans, chercheur principal au Centre d’imagerie cérébrale McConnell de l’Institut et hôpital neurologiques de Montréal. Le représentant cubain est le DrÌýPedroÌýAntonioÌýValdés-Sosa, coordonnateur du Projet de cartographie cérébrale cubain au . La Chine est quant à elle représentée par le PrÌýDezhongÌýYao, de (USTEC), à Chengdu.
Si le Canada, la Chine et Cuba sont très éloignés sur les plans culturel et géographique, ils présentent néanmoins d’importantes similitudes. En effet, ces trois pays offrent des services de santé financés, à divers degrés, par l’État, ce qui signifie qu’ils accordent une large place aux projets de recherche dont les résultats sont susceptibles d’influer sur la santé publique. Chacun de ces pays apportera ses propres compétences au projet.
Les plateformes de calcul CBRAIN et LORIS, conçues par le laboratoire du PrÌýEvans pour le stockage et la mise en commun de données scientifiques, joueront un rôle déterminant dans la réussite de l’Axe trinational sur le vieillissement cognitif normal et pathologique. Elles permettront le transfert de données entre les scientifiques canadiens, cubains et chinois, et constitueront la pierre angulaire d’une plateforme pour la neuroinformatique destinée aux trois pays qui facilitera la recherche collaborative sur d’autres troubles neurologiques et mentaux.
«ÌýCBRAIN est un portail Web donnant accès à l’infrastructure canadienne de calcul haute performance et au nuageÌý», affirme le PrÌýEvans. «ÌýEn se connectant à la plateforme CBRAIN à l’aide d’un ordinateur portable, un scientifique peut produire des résultats à partir d’un algorithme beaucoup plus rapidement que s’il se servait d’un ordinateur local. Aux quatre coins du monde, plus de 500Ìýscientifiques utilisent déjà la plateforme CBRAIN.Ìý»
La plateforme LORIS est une base de données Web regroupant divers types d’éléments d’information en neurosciences. «ÌýLORIS intègre des clichés d’imagerie, des résultats de tests comportementaux et psychologiques ainsi que des données génomiques et épigénomiquesÌý», souligne le PrÌýEvans. «ÌýFait important à noter, ces éléments d’information complexes peuvent être saisis et analysés pour un sujet en particulier. La plateforme LORIS soutient déjà de nombreux projets multicentriques partout dans le monde.Ìý»
À titre de pays le plus peuplé du monde, la Chine dispose d’un énorme bassin de patients qui constituent une source précieuse de données. Selon le PrÌýEvans, la principale contribution de la Chine à ce projet viendra de la production de données ainsi que de son expertise en analytique avancée.
«ÌýSi la Chine ne dispose d’aucune plateforme informatique nationale intégrée pour les neurosciences, comme CBRAIN et LORIS, elle possède néanmoins un énorme bassin de sujets. Si nous, les Occidentaux, estimons qu’un échantillon de 100Ìý000Ìýsujets est imposant, la Chine à elle seule peut nous fournir des données sur plus d’un million de personnes. Ce pays compte en outre des populations génétiques particulières pouvant constituer des sources de données précieuses et servir à la conception de nombreux modèles informatiques complexes.Ìý»
Ces données seront analysées avec beaucoup d’intérêt, affirme le DrÌýValdés-Sosa, qui occupe également un poste de chercheur à l’USTEC, à Chengdu. Les neuroscientifiques cubains sont passés maîtres dans l’art de combler les fossés entre recherche fondamentale, applications cliniques et santé des populations, expertise qu’ils mettront à profit dans le cadre de ce projet.
«ÌýCuba ne dispose pas des ressources nécessaires pour générer de grandes quantités de données, mais espère tirer profit des données recueillies dans d’autres paysÌý», souligne le DrÌýValdés-Sosa. «ÌýCe projet trilatéral est révolutionnaire. Je ne connais aucune initiative semblable.Ìý»