Majoritaires au doctorat, seul un tiers des femmes trouvent un emploi dans l’enseignement au Canada
Si les femmes représentent aujourd’hui les deux tiers des titulaires de doctorats canadiens en éDZDz, elles ne représentent néanmoins qu’un tiers des professeurs candidats à la permanence. Selon une étude récente de l’Université ƽ岻, alors qu’au cours des 15 dernières années, les hommes titulaires d’un doctorat canadien ont généralement trouvé un emploi menant à la permanence au Canada, on ne peut pas en dire autant des femmes, et il est fort à penser que la pandémie de COVID-19 exacerbera ces inégalités.
Publiée dans la revue , l’étude est la première à suivre le parcours des archéologues des bancs de l’université jusqu’à leur entrée dans l’enseignement afin de déterminer à quel moment les femmes se détournent de la voie académique. L’étude est également la première à se pencher sur les demandes de subventions déposées par des femmes dans le domaine de l’éDZDz au Canada et du taux d’obtention.
« Il existe un “climat inamical” à l’égard des femmes dans le milieu universitaire. Parmi les facteurs pouvant expliquer ce faible taux d’attribution figurent des pratiques subtiles qui alimentent des stéréotypes, et qui excluent et dévalorisent les femmes, ainsi qu’un milieu de travail inhospitalier, particulièrement pour les aidantes de première importance », soutient Lisa Overholtzer, coauteure de l’étude, professeure adjointe et titulaire d’une chaire William-Dawson au Département d’anthropologie de l’Université ƽ岻.
Selon les chercheuses, la plupart des femmes quitteraient le milieu universitaire après avoir investi beaucoup de temps et d’argent dans leurs études doctorales et avant d’accéder à des postes menant à la permanence. Au cours des dix dernières années, les femmes ont obtenu 64 % des doctorats en éDZDz délivrés au Canada, mais n’occupent présentement que 46 % des postes de professeur adjoint.
« On pourrait croire que 46 % est un nombre satisfaisant. Après tout, c’est presque 50 %. Toutefois, nous ne devrions pas viser une égale représentation hommes-femmes, mais plutôt un ratio reflétant la proportion des sexes dans les bassins de candidats », explique Catherine Jalbert, coauteure de l’étude et archéologue à la Commission historique du Texas.
Disparités hommes-femmes dans l’embauche de diplômés canadiens
Une baisse importante de l’embauche, conjuguée à la fin de la retraite obligatoire, s’est traduite par une diminution du nombre d’emplois. Ce phénomène coïncide avec la période à laquelle la proportion de femmes titulaires d’un doctorat a dépassé celle de leurs homologues masculins. Toutefois, selon les chercheuses, cela n’expliquerait pas pourquoi les femmes sont moins nombreuses à occuper de tels postes.
La situation est encore moins réjouissante lorsqu’on compare le parcours des titulaires d’un doctorat canadien à celui des titulaires d’un doctorat étranger au Canada. « Si la plupart des hommes embauchés ici sont titulaires d’un doctorat canadien, la majorité des femmes embauchées au Canada ont quant à elles étudié à l’étranger », ajoute Lisa Overholtzer.
Seuls quatre des 28 postes de professeur adjoint (soit 14 %) sont présentement occupés par des femmes ayant étudié au Canada. Trente-six pour cent (36 %) des hommes ayant obtenu leur doctorat en éDZDz entre 2003 et 2017 sont aujourd’hui professeurs dans une institution canadienne, contre 12 % des femmes qui ont étudié avec eux.
Aux États-Unis, le taux d’embauche de femmes titulaires d’un doctorat canadien est supérieur au taux canadien, et dépasse même celui des hommes. Les chercheuses constatent néanmoins que les chiffres ne compensent pas l’écart dans l’embauche des hommes et des femmes au Canada. Par ailleurs, les femmes ne semblent pas s’être davantage tournées vers des emplois dans d’autres branches de l’éDZDz.
Le problème des subventions de recherche universitaire
Les chercheuses ont constaté que, quel que soit leur niveau, les femmes étaient tout aussi enclines que les hommes à demander des subventions de recherche fédérales. Il existe néanmoins un écart – faible, certes, mais persistant – dans l’attribution des subventions des doctorants aux professeurs d’université, et ce, à tous les niveaux. Un mentorat et des conseils à deux vitesses ou une dévalorisation des méthodes de recherche et des questions généralement explorées par les femmes pourraient en être à l’origine.
« Nos travaux pointent du doigt certaines dispositions de la politique fédérale, comme l’admissibilité à un financement du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada pour faire garder un enfant à charge, ajoute la Pre Overholtzer. Aujourd’hui, seules les femmes allaitant leur enfant ou les mères monoparentales sont admissibles à une prise en charge des frais de garde. Nous pensons que l’éDZDz et d’autres disciplines pourraient fidéliser davantage les femmes si elles parvenaient à couvrir les dépenses de garde d’enfant engagées lors des déplacements sur le terrain, peu importe l’âge des enfants ou la situation matrimoniale de la femme », explique-t-elle.
Les solutions possibles
La réduction de cet écart passera inévitablement par une hausse de l’embauche. Il faudra toutefois attendre à l’après-COVID pour s’attaquer à cette question, car de nombreuses universités font présentement face à un gel du recrutement et à des restrictions budgétaires. Néanmoins, selon les chercheuses, une autre solution pourrait consister à rehausser le quota de femmes du Programme des chaires de recherche du Canada.
« Nous avons la responsabilité d’examiner la manière dont on forme et prépare les femmes sur le terrain. Nous devons également nous pencher sur nos pratiques d’embauche pour comprendre pourquoi on engage moins souvent de femmes que d’hommes, surtout au Canada. »
Les auteures indiquent que leur analyse s’est limitée au genre, mais qu’il existe probablement d’autres inégalités liées aux différents facteurs identitaires croisés – notamment la race, la classe sociale et la situation parentale. Elles comptent désormais se pencher sur ces différents facteurs et étudier les répercussions de la pandémie sur l’avancement professionnel, la productivité en recherche et le bien‑être des archéologues canadiens.
À propos de l'étude L’article « A “Leaky” Pipeline and Chilly Climate in Archaeology in Canada », par Lisa Overholtzer et Catherine L. Jalbert, a été publié dans la revue . DOI : |
L’Université ƽ岻
Fondée en 1821 à Montréal, au Québec, l’Université ƽ岻 figure au premier rang des universités canadiennes offrant des programmes de médecine et de doctorat. Année après année, elle se classe parmi les meilleures universités au Canada et dans le monde. Établissement d’enseignement supérieur renommé partout dans le monde, l’Université ƽ岻 exerce ses activités de recherche dans deux campus, 11 facultés et 13 écoles professionnelles; elle compte 300 programmes d’études et au-delà de 40 000 étudiants, dont plus de 10 200 aux cycles supérieurs. Elle accueille des étudiants originaires de plus de 150 pays, ses 12 800 étudiants internationaux représentant 31 % de sa population étudiante. Au-delà de la moitié des étudiants de l’Université ƽ岻 ont une langue maternelle autre que l’anglais, et environ 19 % sont francophones.