La vigueur et la durée de l’immunité naturelle et vaccinale sont déterminantes dans l’évolution à long terme de la COVID-19
Une étude parue récemment dans la revue Science donne à penser que l’immunité, tant naturelle que vaccinale, sera déterminante dans l’évolution de la pandémie de COVID-19. Ainsi, un vaccin capable de provoquer une réaction immunitaire vigoureuse pourrait alléger considérablement le fardeau de cette infection.
« Jusqu’à maintenant, on s’est beaucoup attaché – avec raison – aux effets des saisons et des interventions non médicamenteuses, comme le port du masque et la distanciation physique, sur l’évolution de la COVID-19 », fait observer Chadi Saad-Roy, coauteur principal de l’article et doctorant au Lewis-Sigler Institute for Integrative Genomics de l’Université de Princeton. « À court terme, et pendant que nous sommes en pandémie, les interventions non médicamenteuses sont les principaux déterminants du nombre de cas. Mais plus le temps passera, plus l’immunité prendra de l’importance. »
« Nous ignorons dans quelle mesure l’immunitĂ© naturelle au SARS-CoV-2 – ou celle qu’apportera un Ă©ventuel vaccin – sera forte ou durable », prĂ©cise Caroline Wagner, coauteure principale et professeure adjointe de bioingĂ©nierie Ă l’UniversitĂ© Ć˝ĚŘÎ岻ÖĐ, qui a contribuĂ© Ă l’étude Ă titre d’associĂ©e de recherche postdoctorale au Princeton Environmental Institute.
« Par exemple, s’il peut y avoir réinfection, quel est l’effet de la réaction immunitaire provoquée par l’infection antérieure?, demande la Pre Wagner. Peut-elle empêcher la transmission du virus lors de la réinfection? Ce sont tous des éléments qui vont influer sur l’évolution des éclosions à venir. »
ł˘â€™Ă©tłÜ»ĺ±đ dont il est question ici s’inscrit dans la foulĂ©e de travaux de la mĂŞme Ă©quipe, dont les rĂ©sultats ont Ă©tĂ© publiĂ©s le 18 mai dernier dans Science; les chercheurs annonçaient alors que les variations climatiques rĂ©gionales n’allaient vraisemblablement pas jouer un rĂ´le prĂ©pondĂ©rant pendant la première vague de la pandĂ©mie.
Dans le volet plus récent de l’étude, les chercheurs y vont de projections sur l’incidence future des cas de COVID-19 – et sur le degré d’immunité de la population – formulées à l’aide d’un modèle simple et d’une série d’hypothèses portant sur la probabilité de transmission du virus dans divers contextes. Ainsi, le modèle prévoit diverses durées d’immunité post-infection ainsi que divers degrés de protection contre la réinfection. Une reposant sur ces hypothèses est accessible en ligne.
Comme on pouvait s’y attendre, le sommet de la pandémie est en grande partie indépendant de l’immunité, puisque la majeure partie de la population est sensible au virus. Toutefois, plus le SARS-CoV-2 – et par le fait même, l’immunité – se répand dans la population, plus les schémas épidémiques possibles sont nombreux.
« Si la réaction immunitaire est timide ou ne procure qu’une protection de courte durée, par exemple, on peut s’attendre à des éclosions plus étendues et plus fréquentes à moyen terme », souligne Andrea Graham, professeure d’écologie et de biologie de l’évolution à l’Université de Princeton, et coauteure de l’article.
La nature de la réaction immunitaire peut également influer sur l’issue clinique et le fardeau des cas graves nécessitant une hospitalisation, ont constaté les chercheurs. La gravité des réinfections par rapport à celle de la primo-infection : voilà le nœud de la question.
Fait à noter, dans tous les scénarios envisagés, un vaccin capable de déclencher une solide réaction immunitaire pourrait réduire considérablement le nombre de cas. D’ailleurs, même s’il n’offrait qu’une protection partielle contre la transmission secondaire, un vaccin largement déployé pourrait procurer des bienfaits appréciables, estiment les chercheurs.
On sait que des facteurs comme l’âge et les événements de super-propagation influent sur la dissémination du SARS-CoV-2, puisqu’ils agissent sur la réaction immunitaire et sur le taux de transmission virale. Les auteurs ont constaté que ces éléments ne modifiaient en rien les projections qualitatives sur l’évolution des futures éclosions. Cependant, préviennent-ils, au fur et à mesure que les candidats-vaccins feront leur apparition, on devra tenir compte de la vaccination dans la projection du nombre de cas et intégrer ces données à des modèles plus complexes.
Les auteurs se sont également intéressés à l’effet de la « réticence à la vaccination » sur l’évolution de la pandémie. Selon leur modèle, même si on disposait d’un vaccin, les personnes qui refusent d’appliquer les mesures médicamenteuses et non médicamenteuses pourraient nuire aux efforts que l’on déploie pour juguler la COVID-19.
« Notre modèle indique que si les gens sont nombreux à refuser le vaccin et qu’à ce refus s’ajoutent une transmission accrue et des comportements risqués, par exemple le rejet du masque, le taux de vaccination nécessaire à l’obtention d’une immunité collective pourrait être beaucoup plus élevé », affirme l’un des coauteurs, Simon Levin, titulaire de la chaire de recherche James‑S.‑McDonnell en écologie et en biologie de l’évolution, et professeur agrégé au Princeton Environmental Institute. « Le cas échéant, la nature de la réaction immunitaire consécutive à l’infection ou à la vaccination serait un élément déterminant de l’efficacité du vaccin. »
S’il est une chose à retenir de cette étude, c’est que nous devons absolument suivre de près non seulement les infections en cours, mais également l’immunité de la population au SARS-CoV-2, pour prévoir efficacement l’incidence future des infections.
« Formuler des projections exactes n’est pas chose simple, a fortiori si on ne comprend pas bien la nature de la réaction immunitaire », explique un autre des coauteurs, Michael Mina, professeur adjoint à l’École de santé publique et à la Faculté de médecine de l’Université Harvard. « Même si nous avons en main la valeur quantitative d’un paramètre clinique, par exemple le titre d’anticorps, nous ne savons pas nécessairement ce que cela signifie au chapitre de la protection. »
On devra maintenant étudier les effets des lymphocytes T et de l’immunité croisée issue de l’exposition à d’autres coronavirus.
ł˘â€™Ă©tłÜ»ĺ±đ
L’article « », par Chadi M. Saad-Roy, Caroline E. Wagner et coll., a été publié dans la revue Science.
ł˘â€™Ă©tłÜ»ĺ±đ a Ă©tĂ© financĂ©e par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en gĂ©nie du Canada, la Life Sciences Research Foundation, le Cooperative Institute for Modelling the Earth System (CIMES) de l’UniversitĂ© de Princeton, la James S. McDonnell Foundation, le C3.ai Digital Transformation Institute, la National Science Foundation, les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis et le Flu Lab.
FondĂ©e en 1821 Ă MontrĂ©al, au QuĂ©bec, l’UniversitĂ© Ć˝ĚŘÎ岻ÖĐ figure au premier rang des universitĂ©s canadiennes offrant des programmes de mĂ©decine et de doctorat. AnnĂ©e après annĂ©e, elle se classe parmi les meilleures universitĂ©s au Canada et dans le monde. Établissement d’enseignement supĂ©rieur renommĂ© partout dans le monde, l’UniversitĂ© Ć˝ĚŘÎ岻ÖĐ exerce ses activitĂ©s de recherche dans deux campus, 11 facultĂ©s et 13 Ă©coles professionnelles; elle compte 300 programmes d’études et au-delĂ de 40 000 Ă©tudiants, dont plus de 10 200 aux cycles supĂ©rieurs. Elle accueille des Ă©tudiants originaires de plus de 150 pays, ses 12 800 Ă©tudiants internationaux reprĂ©sentant 31 % de sa population Ă©tudiante. Au-delĂ de la moitiĂ© des Ă©tudiants de l’UniversitĂ© Ć˝ĚŘÎ岻ÖĐ ont une langue maternelle autre que l’anglais, et environ 19 % sont francophones.